©Crédit photo : Meejai Korat
Avec un titre un peu polémique, et une introduction qui fera sans doute réagir certain.e.s au delà de toute pondération, cette article est néanmoins important. Il m’est venu l’idée de faire cet article après avoir vu une vidéo sur le féminisme militantiste au sujet de la procréation chez les bipèdes homo sapiens sapiens.
Etant entendu que le sujet n’est pas de remettre en cause la droit social de chaque individu à disposer librement de son corps, je ne peux m’empêcher de faire un parallèle avec ce que j’observe ici à la Chatterie. Le chat étant comme l’homo sapiens sapiens un mammifère, une certaine analogie peut ainsi être réalisée et dans certain cas une forme d’anthropomorphisme est évident et inévitable tant le chat prend une place importante dans notre vie.
Entant un mâle blanc cis genre hétéro, j’entends déjà le son des tirs de barrage d’une certaine catégorie de personnes qui placent leur féminisme comme fer de lance de leur genre sans se poser une seconde les vraies questions soit par déni militantiste soit en faisant preuve d’une bêtise naïvement instrumentalisée par des considérations sociétales qui frisent parfois l’absurde…
Revenons à la base, il y a deux choses indissociables dans l’acte de reproduction, l’acte visant à la reproduction et le plaisir associé. Le plaisir étant une notion relative et fluctuante ce n’est pas ce qui a de plus évident à quantifier ; regardons ce qui se passe avec les chattes mais avant faisons un petit rappel de base pour commencer :
L’acte de reproduction a un but évident et primordiale qui n’a pas à être intellectualisé car c’est un fait anthropologique : la survie de l’espèce. Toutes autres considérations ne sont que des arguments sociétaux, intellectualisés et non des arguments fondés sur une problématique biologique.
Parce qu’il n’y a qu’un faible pourcentage des progénitures qui atteignent l’âge adulte dans le milieu naturel, il y a une nécessité fondamentale à ce reproduire ; c’est inscrit dans les gènes et dans le fonctionnement du vivant.
Il en est de même pour l’homo sapiens sapiens à ceci près que celui-ci vie en société et que celle-ci va générer des contraintes sociales qui peuvent moduler par certains aspects ce besoin impérieux, et à notre époque générer un paquet de contradictions parfois des plus affligeantes.
Car la nécessité de vie en société a permis de réduire le taux de mortalité ; les notions de contraception et donc d’intellectualisation du besoin impérieux de la descendance font que dans la majorité des cas, l’acte de reproduction n’est pratiqué que pour le plaisir que l’on en retire. Au passage, cette modification du paradigme de la survie génère des commentaires parfois édifiant voir totalement stupide, mais bon à ce stade de l’article ce n’est plus ce qui m’intéresse…
Revenons aux chats, les individus femelles ont donc la responsabilité fonctionnelle de la reproduction de l’espèce et donc de sa survie ; cela va générer un ordre social fonctionnel au sein de la communauté. Périodiquement, à une fréquence variable, celles-ci vont donc exprimer leur disponibilité et donc tolérer la présence du mâle en autorisant celui-ci à les faire souffrir pour la bonne cause (ndlr : la perpétuation de l’espèce). Quand elles ne sont pas disponible, le mâle en fait les frais en se faisant littéralement violenté le forçant à des retraits stratégiques avant de retenter une approche prudente.
Ce qui est paradoxale avec le système de reproduction chez le chat, à la différence de l’homo sapiens sapiens c’est la douleur (ou le plaisir induit par la douleur) qui provoque l’expulsion de l’ovule et va permettre sa fécondation. Une femelle ainsi disposée (ndlr : en chaleur) mettra tout en œuvre pour attirer les faveurs de partenaires (au besoin multiple) afin de maximiser les chances de succès de sa mission de survie (une autre légère différence entre le félis silvestris catus et l’homo sapiens sapiens).
Si dans l’utérus de l’homo sapiens, c’est la présence de l’ovule prêt à être fécondé qui génère une variante comportementale (qui peut être nié consciemment…avec des conséquences volontairement minimisés pour des raisons sociales mais néanmoins parfois dangereuse...sic!), chez le chat c’est la disponibilité de la production d’ovule qui est le déclencheur. Dans les deux cas, ce sont un jeu d’équilibre subtil d’hormones. A la seule différence qu’à part dans de rare cas chez l’homo sapiens sapiens, il ne peut y avoir qu’un seul ovule fécondé et fécondable.
Ainsi le caractère ontologique des femelles visant à permettre de maximiser les chances d’avoir des progénitures atteignant l’âge adulte génère un comportement sexuel qui chez les Korat est très actif. Ainsi une femelle peut durant l’année avoir une activité sexuelle très importante et ainsi être disponible à l’accomplissement de sa mission à une fréquence très élevée (3 à 4 gestations par an) nécessitant une résilience importante afin de pouvoir maximiser les chances de mener à bien sa mission.
Ainsi la récupération « fulgurante » de l’opérationnalité de l’appareil reproducteur permet une disponibilité à peine 70 jours après la naissance des chatons. Cela implique deux choses, d’une part le sevrage des progénitures doit être rapide afin qu’elle puisse récupérer des forces pour la gestation suivante et ensuite la nécessité de faire fonctionner la « machine » sans la contrainte à une abstinence artificielle de trop longue durée sous peine de créer des complications fonctionnelles qui vont nuire au bon fonctionnement de l’appareil reproducteur (ndlr : et avec des conséquences parfois dramatique : piomètre, métrite, kyste ovarien, etc…).
Chez l’homo sapiens sapiens, la gestation et le sevrage prend beaucoup plus de temps et même si l’appareil reproducteur est de nouveau opérationnel dès le retour du cycle menstruel ; les impératifs liés au sevrage de la progéniture crée une inertie temporelle entre la disponibilité des organes reproducteurs et la disponibilité « sociale » (ndlr : je ne parle pas de la dimension du plaisir procuré par l’acte qui rentre en ligne de compte dans cette disponibilité “relative”). Il y a par ailleurs une intellectualisation de la naissance qui agit comme un puissant contraceptif pour permettre le bon déroulement du sevrage de la progéniture.
Entendons-nous bien sur la notion de sevrage. Le sevrage c’est quand la progéniture n’a plus besoin de la mère pour se nourrir de façon autonome. Il n’est nullement question d’éducation. L’éducation de la progéniture est une fonction sociale. Dès que la transition alimentaire de la progéniture est réalisée, le sevrage est terminé, chez le chat comme chez l’homo sapiens sapiens. Par contre l’éducation ça c’est autre chose !
L’éducation du chaton commence beaucoup plus tôt que celui de l’enfant homo sapiens sapiens, déjà parce que le sevrage est aussi beaucoup plus rapide, genre 7 fois plus rapide, quand il faut deux mois et demi au chaton pour commencer à être sevré, la progéniture d’homo sapiens sapiens… ce n’est pas la même tisane ! A 18 mois l’autonomie alimentaire n’est pas encore une affaire réglée et parfois, inconsciemment on fait durer le plaisir !
Maintenant on arrive dans le cœur de problème. En élevage il y a des considérations sanitaires ; on ne peut pas se permettre de laisser le cycle naturel courir à son rythme et laisser les femelles s’épuiser avec des gestations à hautes fréquences comme le cycle naturel le permet mais on ne peut pas non plus le contraindre trop sans risque de voir se développer des pathologies évoquées plus haut.
Il faut donc trouver un équilibre, le plus sains possible, afin de laisser le temps à l’organisme de pleinement retrouver son capital de santé sans pour autant risquer de le détériorer par des délais inconsidérés justifié uniquement par des considérations générées par un excès d’anthropomorphisme.
Etant entendu que la gestation chez l’homo sapiens sapiens n’étant pas tout à fait le même et n’ayant pas le même impact et étant entendu que nos considérations sociétales ne sont pas pertinentes, les arguments de certain.e.s éleveu.r.euse.s qui appliquent un argumentaire anthropomorphique à celui des félis silvestris catus est stupide et dangereux.
Nier la nature, et on le paie très cher (ndlr : en frais de véto mais surtout au niveau du bien-être de la femelle) car interdire à une femelle de faire ce que sa nature lui commande est vécu comme une souffrance terrible.
Dans notre établissement, nous avons décidés d’avoir une approche pragmatique avec comme point central le bien être de nos chats. D’une part en laissant autant de temps que nécessaire notre mâle avec la femelle en chaleur et d’autre part en ayant un délai raisonnable entre chaque saillie mais sans pour autant atteindre une durée trop importante. Nous considérons que laisser trop de temps va générer des collatéraux sur la santé de nos reproductrices inacceptable. Par conséquent, nous attendons au moins deux cycles de chaleurs (soit 4 mois 1/2) au minimum entre la naissance des chatons et la nouvelle saillie. Mais tout dépend de l’état de santé de la femelle au moment de ses chaleurs.
C’est par le suivis de la santé et par un examen exhaustif de l’état générale de la femelle qui va déterminer le “go” ou le “no go”. Etant entendu qu’au plus la portée précédente a vu un nombre important de chatons nés, au plus le délais de sécurité que nous imposons pour permettre à la femelle de reprendre sa forme est important. Mais ce qui est sûr, c’est qu’attendre trop c’est prendre un gros risque.
Le L.o.o.f. recommande 3 portées en 2 ans, c’est pour les Korat un trop longue attente entre chaque portée, les chats asiatiques (Maew Boran) de part leur évolution et leur environnement naturel ont une nécessité physiologique plus importante que les chats occidentaux. Attendre 8 mois entre chaque portée, c’est interdire l’aboutissement de 9 cycles de chaleurs est une très mauvaise idée.
Cette interdiction va générer des frustrations dans le meilleur des cas et des maladies graves dans le pire des cas. Cette disposition est à notre avis motivée par des considérations anthropomorphique d’Homo sapiens sapiens.
Voilà, un article motivé à la base par la stupidité de certains homo sapiens sapiens qui ont un peu perdu de vue la dimension, la signification et l’implication du fait sexuel dans la survie de l’espèce afin d’illustrer une problématique réel de l’éleveur pour maintenir ses reproductrices en excellente santé moral, affective et physique. La comparaison est certes un peu osée mais on a un peu tendance à oublier que nous sommes aussi des animaux !